Comment a débuté votre collaboration autour de ce projet d’opéra?
American Atheist est notre troisième collaboration opératique, après Fade (2008) et  The Scarlet Ibis (2015). Notre collaboration est forte et nous allons naturellement d’un projet à l’autre ensemble. Après The Scarlet Ibis, nous voulions trouver une histoire à la fois intense, mais plus contemporaine et peut-être aussi un peu controversée. Stefan et moi sommes tous les deux attirés par des combats à la vie à la mort, mais aussi par des histoires ayant une dimension méditative et philosophique. Nous sommes également tous les deux athées, et l’idée de rentrer dans l’esprit d’une athée confrontée à la mort nous a plu. L’opéra est idéal pour représenter des hommes et des femmes qui s’élèvent au-dessus de leurs conditions, spirituellement et intellectuellement. Une grande passion, de grandes idées et des comportements scandaleux qui remettent en cause le concept de Dieu, des hommes et de toute autorité.

Parlez-nous du livret de cet opéra
À l’heure actuelle (nous développons et écrivons toujours la pièce), l’opéra se déroule en huit scènes qui défilent de manière non linéaire, des derniers jours de la Seconde Guerre mondiale à 2001, lorsque les os de Madalyn ont été découverts par la police au Texas. Ce n’est pas un biopic conventionnel comme dans les films, mais on donne des instantanés de la vie de Madalyn, la montrant à des moments critiques de son évolution en tant que femme, dirigeante athée et enfin confrontée à ses assassins. De manière générale, chaque scène est liée à un passage d’une messe de requiem. Certaines scènes correspondent donc à des parties d’une messe typique : « Requiem Aeternum », « Kyrie Eleison », « Dies Irae », etc.

Comment travaillez-vous avec le compositeur?
Stefan et moi nous rencontrons régulièrement pour discuter d’histoires, de recherches, d’effets théâtraux, d’idées musicales, de tout ce qui nourrit le processus narratif et créatif. Une fois que nous avons une idée précise de ce qui se passe dans une scène donnée, je rédige quelques pages. Comme la concision et la légèreté sont la clé d’un bon livret, j’essaie de ne pas écraser la scène. Cela peut être très difficile, surtout avec des personnages aussi puissants et aussi loquaces que Madalyn ! J’écris la scène en utilisant des dialogues, de longs discours solos comme des airs, des duos, des chœurs, tout ce qui fait avancer l’histoire et définit le personnage. Stefan lit la scène, fait des commentaires et suggère des coupes ou des révisions, et on fait des allers-retours jusqu’à ce que nous soyons tous les deux satisfaits. Puis il entre dans sa grotte de sorcier et écrit une musique magnifique qui, inévitablement, convient au texte et permet à la scène de respirer et de vivre.

Quels sont les enjeux pour l’écriture d’un livret en opéra contemporain?
À l’opéra, la musique est reine, mais une reine n’est rien sans sa cour. Le livret est un élément structurant essentiel pour que la musique puisse « régner ». Dans le meilleur des cas, mon livret capture l’imagination du compositeur, l’inspire à créer d’excellentes phrases musicales et finit par se fondre dans la construction du drame musical. Je contribue avec des mots — qui ont leur propre force et musicalité — pour que ceux-ci nourrissent à leur tour la musique de chaque opéra. Une phrase très simple peut avoir une résonance profonde et sentimentale, quand elle s’accorde à la musique qui lui convient. Tout autant qu’une écriture plus complexe peut sembler maladroite et vaniteuse si elle ne convient pas à l’opéra ou à la musique. S’il existe un panthéon de grands librettistes – Lorenzo Da Ponte, Metastasio, Hugo von Hofmannsthal, Arrigo Boito –  personne ne croit que c’est un livret exceptionnel qui peut être la principale raison du succès d’un opéra. En contre-partie, je crois qu’un livret pauvre ou superficiel peut empêcher un opéra d’atteindre des sommets. Je pense également que l’opéra américain partage beaucoup de l’ADN de la comédie musicale américaine dans laquelle les mots et la musique ont un pouvoir plus égal. Un autre enjeu important est le fait qu’il y ait beaucoup de nouveaux opéras présentés en première mondiale qui finissent ensuite par disparaitre à jamais de la scène. Pour ma part, j’espère que mes opéras puissent vivre longtemps et parcourir le monde.

Votre instrument favori ?
J’aime la clarinette pour son intelligence et son agilité « colorée ». Mais j’admire aussi l’âme du basson. J’imagine que je préfère les bois.

Dernier coup de cœur pour un disque, spectacle, expo, série ou film ?
En ce qui concerne les séries télévisées, j’aime les émissions de genre sombre — GodlessThe Terror et OzarkRussian Doll, une série récente de Netflix, a été une distraction à la fois étrange et addictive. À la Frick Collection à New York, j’ai adoré la rétrospective de portraits de la Renaissance par Moroni. Je lis présentement The Goldfinch de Donna Tartt, savourant chaque phrase si merveilleusement travaillée.

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Un extrait de American Atheist sera présenté lors de l’événement Oper’Actuel – Works in progress 2019

Deux représentations GRATUITES :
Samedi 16 mars, 20h
Dimanche 17 mars, 16h
Gesù-Centre de créativité
Infos – 514 861-4036
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